Paris, le 4 avril 2023 – Deux semaines après la publication du 6ème rapport du GIEC, que disent les dirigeants des PME-ETI de leur contribution à l’atteinte des objectifs de neutralité carbone ? Quelles actions importantes ont-ils engagé en matière de transition écologique et énergétique ? C'est l’objet de la troisième étude Climat de Bpifrance Le Lab, publiée à l’occasion de « Jour E », l’évènement annuel de Bpifrance regroupant aujourd’hui plus de 1000 entrepreneurs à Ground Control à Paris, dédié à l’accélération de la transition écologique et énergétique des PME-ETI. Cette étude apporte un éclairage utile au moment où les effets du dérèglement climatique se font plus précisément sentir.

Menée auprès de 405 dirigeants PME de plus de 10 salariés et d’ETI, complétée par une quarantaine d’entretiens de dirigeants et d’experts, l’enquête Bpifrance Le Lab illustre le passage à l’action des dirigeants avec des chiffres en nette hausse par rapport à 2020 :

• 72% des dirigeants déclarent avoir réduit leurs émissions carbone au cours des cinq dernières années, contre 46% en 2020
• Et 88% pensent pouvoir les réduire dans les 5 prochaines années, contre 73% en 2020

Les PME et ETI représentent 30 % de l’empreinte carbone de la France

Souvent invisibles dans les politiques publiques, les PME-ETI semblent ne pas compter pour la réussite de la transition écologique. Or, leur contribution à l’empreinte carbone est déterminante, puisque selon nos estimations, elles représentent environ 30 % de l’empreinte carbone de la France. Cette estimation est un ordre de grandeur, recomposé à partir de l’empreinte carbone de la France et d’éléments de comptabilité nationale, et ne s’apparente en aucun cas à un bilan des émissions de gaz à effets de serre des PME et ETI en France. En comparaison internationale, la British Business Bank estime que les PME britanniques comptent pour 29 à 36 % des émissions nationales, pour un poids globalement comparable des PME dans son économie.

67% des dirigeants affirment suivre les sujets climatiques, contre 31% en 2020 : un chiffre qui illustre les efforts menés depuis 3 ans

Lors de ses premiers travaux sur le sujet en 2020, Bpifrance Le Lab observait une dissonance entre une conscience citoyenne forte des dirigeants, et un niveau d’actions assez faible. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. 82% des dirigeants intègrent l’enjeu climat dans leur stratégie d’entreprise (vs 50% en 2020), 35% déclarent avoir évalué leurs émissions carbone au cours des 5 dernières années (vs 16% en 2020) et 72% déclarent avoir réduit leurs émissions carbone au cours des 5 dernières années (vs 46% en 2020).

Elise Tissier, Directrice de Bpifrance Le Lab déclare : « On ne peut que se réjouir du véritable passage à l’action opéré par dirigeants des PME-ETI depuis 2020 qui font preuve d’une ambition écologique croissante. Représentant 30% des émissions carbone de la France, les PME-ETI doivent néanmoins accélérer leurs plans d’action climat afin d’avoir un véritable impact sur la trajectoire d’émission carbone du pays. »

Les PME-ETI ont des projections à 5 ans encourageantes

Questionnés sur leur pouvoir d’action dans les 5 ans à venir, 88% des dirigeants de PME-ETI déclarent pouvoir réduire leur empreinte carbone (contre 73% en 2020). Et pour y parvenir, ils prévoient des actions plus fortes dans cet horizon de 5 ans, avec l’écoconception (pour 43% des dirigeants) et la sélection de fournisseurs (pour 40%), le premier moyen identifié étant l’achat d’équipements plus performants énergétiquement (pour 60% d’entre eux). Autant de données a priori rassurantes pour l’avenir. Mais les dirigeants courent-ils un marathon ou un sprint ? Ni l’un ni l’autre à ce jour.

Or, pour infléchir la trajectoire des émissions carbone et tirer bénéfices « d’écopportunités » (source : étude Bpifrance Le Lab 2021 « Agir face aux enjeux climatiques »), il est urgent pour les chefs d’entreprise d’agir vite pour une transition qui ne se fait pas en un jour, tant elle implique une transformation profonde du business model, un degré d’innovation élevé, et des compétences multiples.

Plusieurs éléments doivent donc nous alerter : 59% des dirigeants de PME-ETI pensent réduire « un peu » leur empreinte carbone dans les 5 ans à venir, un chiffre quasi inchangé par rapport à 2020. Le manque de temps reste un frein important pour deux tiers des dirigeants. La plupart d’entre eux (63%) ne se sentent pas inquiets sur leur capacité à piloter la décarbonation de leur entreprise, alors que la complexité de cette transition est partagée par les entreprises elles-mêmes.

Néanmoins les actions menées par les PME-ETI sont insuffisantes pour amorcer une véritable inflexion de la courbe des émissions carbone

Pour la grande majorité des dirigeants, les moyens pour verdir leurs activités ont porté sur l’extinction automatique de la lumière (77%), le tri des déchets (68%), l’achats d’équipements plus performants énergétiquement (63%) et la réduction de l’usage du papier et du plastique (58%). Donc il s’agit d’une mise en marche à « petits pas » puisque les actions plus ambitieuses comme l’éco-conception ou la sélection de fournisseurs d’après des critères environnementaux arrivent très loin derrière en termes de moyens mis en œuvre (respectivement 30% et 21%). Jamais les dirigeants ne mettent en avant la nécessaire refonte de leur stratégie ou la modification de leur business model. Il leur faut maintenant changer de braquet pour se maintenir dans la compétition mondiale et s’aligner sur les objectifs de l’accord de Paris.

Les freins rencontrés par les dirigeants des PME-ETI sont connus et demeurent inchangés

Les dirigeants sont-ils empêchés ? La transition climatique est en effet une longue course parsemée d’obstacles. Le premier d’entre eux est la difficile résolution de l’équation économique : au cœur de l’équation, qui finance ? Le client, l’actionnaire (souvent les chefs d’entreprise eux-mêmes dans le cas des PME-ETI), ou l’Etat ? Les dirigeants ayant répondu à notre enquête pointent encore, comme en 2020, le manque de reconnaissance clients (i.e. pas prêts à payer plus cher) pour des produits plus verts (à 75%), l’absence de visibilité sur le retour sur investissement (à 73%) ou encore la perte de compétitivité à court terme par rapport à ses concurrents (à 70%).

La mobilisation de tous les acteurs apparaît donc comme un impératif. La PME seule peut difficilement avancer sur le chemin de la transition. A l’appui : des statistiques et des témoignages sur les lourdeurs administratives, sur les normes qui se superposent et changent en permanence, sur les exigences des donneurs d’ordre qui déclinent sur leur chaîne de valeur leurs propres contraintes réglementaires sans chercher à accompagner leurs fournisseurs.

La conscience écologique des dirigeants comme atout de l’accélération de la transition écologique et énergétique des PME-ETI

Au global, cette étude montre que les chefs d’entreprise s’adaptent en permanence ; c’est le rythme face à l’urgence climatique qui pose question. Certes, la résolution de l’équation économique est indispensable, mais on découvre aussi que la conviction du dirigeant est clé dans la mise en transition d’une PME. A la question, « Quel élément pourrait le plus vous inciter à accélérer le verdissement des activités de votre entreprise ? » (Avec une réponse possible), 31% répondent « l’évolution de leur sensibilité personnelle par rapport aux enjeux climatiques », juste devant l’augmentation des coûts de l’énergie.

Méthodologie de l’étude :

Une enquête en ligne a été menée auprès de dirigeants de PME et ETI entre le 9 mars et le 27 mars 2023. Elle a permis de collecter 405 réponses de PME de plus de dix salariés et d'ETI,

Plus de 40 entretiens ont été menés avec des experts et des chefs d’entreprise :

• 6 dirigeants de PME-ETI
• 23 experts externes des problématiques de décarbonation (consultants, associations de dirigeants, fonds d’investissements verts..)
• 12 experts internes à Bpifrance

Retrouvez l’intégralité de l’enquête via le lien suivant : https://lelab.bpifrance.fr/EtudeClimat