07 Juillet 2022
Temps de lecture : 10min
- Après un net rebond en 2021, l’activité des TPE-PME ralentirait cette année, dans un contexte où les tensions sur les approvisionnements s’accentuent. Elle resterait toutefois dynamique : à +25, le solde d’opinion recule de 11 points sur un semestre mais reste supérieur à sa moyenne historique (+16). Dans ce contexte, et malgré les difficultés de recrutement, les indicateurs d’emploi restent bien orientés.
- La hausse des coûts de production pèse sur la situation financière des TPE-PME, qui s’est dégradée et devrait continuer de se détériorer au cours des prochains mois, partant toutefois d’un niveau très favorable fin 2021. Afin d’amortir le choc, les entreprises puisent davantage dans leur PGE et 76 % d’entre elles envisagent d’amortir leur prêt sur plusieurs années.
- Malgré des conditions d’accès aux financements jugées encore favorables, la dynamique de l’investissement se tasserait en 2022.
- Les TPE-PME de la Construction et du Commerce sont les principales concernées par le ralentissement de l’activité et la dégradation de la situation de trésorerie. Celles du Tourisme, qui bénéficient encore d’un effet de rattrapage post-Covid et d’une moindre exposition aux difficultés d’approvisionnement, sont en revanche plus optimistes.
- Pour 2023, les difficultés d’approvisionnement et l’absence de visibilité quant à l’horizon de leur résorption pèsent sur la confiance des dirigeants. L’indicateur relatif aux perspectives d’activité recule nettement sur un an et se retrouve sous sa moyenne historique. Celui sur l’emploi fléchit également mais reste nettement au-dessus de sa moyenne de long terme.
- À plus long terme, la transition écologique et énergétique (TEE) soutiendrait l’investissement, mais de manière plus prononcée chez les PME (61 %) que chez les TPE (44 %).
1. En 2022, l’activité est attendue en ralentissement mais toujours dynamique. L’emploi serait particulièrement résilient.
Au cours des derniers mois, les tensions sur les approvisionnements se sont accentuées, alimentées par le conflit en Ukraine et la reprise de l’épidémie en Chine : 74 % des TPE-PME y sont confrontées, soit +9 points sur un semestre. Celles-ci se matérialisent surtout par la hausse du prix des intrants et l’allongement des délais de livraison (cités par respectivement 71 % et 74 % des entreprises). En 3e position, la hausse des coûts de transports est citée par 62 % des TPE-PME (+13 points sur un semestre). Les perturbations de la chaîne logistique maritime sont en effet renforcées avec la guerre en Ukraine et les confinements en Chine.
Dans ce contexte et après un net rebond en 2021, les dirigeants de TPE-PME tablent sur un ralentissement de leur activité en 2022, qui resterait néanmoins dynamique sur l’ensemble de l’année. À +25, le solde d’opinion relatif à l’évolution du chiffre d’affaires baisse de 11 points sur un semestre mais est quasi stable sur un an et reste nettement au-dessus de sa moyenne historique (+16). En moyenne, le chiffre d’affaires augmenterait de +4,9 % en 2022 après +7 % en 2021. Cette croissance est néanmoins à nuancer, reflétant probablement en partie l’augmentation prévue des prix de vente, en réaction à la nette hausse des coûts de production.
Malgré le ralentissement de l’activité et des difficultés de recrutement en hausse, les embauches sont attendues en légère accélération cette année. À +21, le solde d’opinion gagne 2 points sur un an et atteint un plus haut depuis 2001. 84 % des dirigeants déclarent pourtant rencontrer des difficultés de recrutement, et 47 % les jugent même sévères, des proportions proches de celles observés avant crise (respectivement 87 % et 49 % fin 2019).
Les perspectives d’activité pour 2022 sont contrastées selon le secteur d’activité et les régions :
- Les TPE-PME du Tourisme affichent des perspectives particulièrement dynamiques après une année 2021 encore sous l’emprise des vagues épidémiques et d’une reprise partielle du tourisme international (solde d’opinion à +61, soit +80 points sur un an). À l’inverse, l’activité ralentirait nettement dans la Construction et le Commerce (−13 et −14 points sur un an). Dans l’industrie, l’activité resterait dynamique, le solde d’opinion se stabilisant à +35.
- Par région, les TPE-PME de PACA et d’Ile-de-France, régions plus touristiques, sont les plus optimistes quant à l’évolution de leur chiffre d’affaires en 2022 (respectivement +6,3 % et +6,1 %). L’activité serait en revanche moins dynamique que la moyenne nationale dans les Hauts-de-France (+2,6 %), et dans une moindre mesure le Grand-Est (+3,7 %) et la Bretagne (+3,9 %). Pour cette dernière, ce moindre dynamisme fait toutefois suite à une année 2021 particulièrement allante.
- Les TPE-PME innovantes et/ou exportatrices affichent un plus grand optimisme que leurs homologues non-innovantes et/ou non- exportatrices.
2. La hausse des coûts de production entamerait la trésorerie des TPE-PME en 2022, partant d’un niveau très confortable fin 2021.
Après avoir atteint son plus haut niveau historique en novembre 2021, l’indicateur relatif à la situation de trésorerie sur les six derniers mois perd 7 points, à −5, un niveau proche de celui d’avant crise (−6 en 2019) et nettement supérieur à sa moyenne historique (−16). La situation de trésorerie des TPE-PME continuerait à se dégrader au second semestre : l’indicateur recule de 9 points, à -12, soit nettement sous sa moyenne de long terme (−2).
Afin d’amortir l’impact des difficultés d’approvisionnements sur leur situation financière, les TPE-PME sont 73 % à prévoir une hausse de leur prix de vente cette année (+7 points depuis six mois). Par rapport à fin 2021, elles sont également plus nombreuses à envisager de rogner sur leurs marges d’exploitation (45 %, soit +8 points). La hausse des prix ne compenserait donc que partiellement celle des coûts.
3. Début 2022, le PGE a été en grande partie consommé pour un peu plus de la moitié des bénéficiaires. Le risque de non-remboursement reste encore limité à ce stade.
Parmi les TPE-PME déclarant avoir souscrit à un PGE, soit environ la moitié des entreprises répondantes, 53 % déclarent l’avoir consommé au moins dans sa majorité (contre 47 % en novembre 2021), dont 35 % dans sa quasi-totalité (contre 29 % en novembre 2021). S’agissant de l’horizon de remboursement, 76 % des dirigeants interrogés envisagent d’amortir leur prêt sur plusieurs années. Ainsi, le prêt serait en partie utilisé afin d’amortir le choc sur les coûts. Le risque de crédit attaché au remboursement des PGE reste relativement limité. 6 % des répondants craignent de ne pas être en mesure de rembourser leur prêt, une proportion proche de celle observée en novembre dernier, mais de 2 points supérieure à celle de mai 2021.
4. La dynamique de l’investissement se tasserait cette année, malgré des conditions d’accès aux financements qui restent dans l’ensemble jugées aisées.
La part des TPE-PME confrontées à des difficultés pour financer leur exploitation à court terme est stable sur un an et reste inférieure à son niveau d’avant crise (10 % contre 13 % en mai 2019). De même, seules 9 % des entreprises interrogées affrontent des difficultés pour accéder aux crédits à l’investissement, une proportion stable sur un an, à un plus bas historique.
Les chefs d’entreprises font néanmoins part de freins à l’investissement un peu plus prégnants ce semestre. La faiblesse de la demande reste le principal obstacle, citée par 48 % des TPE-PME (+2 points sur un an mais −3 points par rapport à mai 2019). Bien qu’encore relativement peu cité, le coût du crédit prend de l’ampleur et constitue désormais un frein pour 19 % des TPE-PME (+8 points sur un an).
Dans ce contexte, 45 % des TPE-PME déclarent avoir investi ou prévoient de le faire en 2022, proportion quasi stable sur un an (+1 points) mais nettement inférieure à son niveau de fin 2019 (51 %). En revanche, l’indicateur relatif à l’évolution des montants investis perd 6 points pour s’établir à -2 (contre une moyenne historique de -4). Le ralentissement serait le plus marqué chez les TPE-PME industrielles : l’indicateur perd 14 points, à +2, et rejoint quasiment sa moyenne historique.
5. En 2023, les chefs d’entreprises interrogés anticipent un ralentissement de l’activité et, dans une moindre mesure, de l’emploi
Bien que les dirigeants de TPE-PME soient 21 % de plus à anticiper une hausse de leur activité plutôt qu’une baisse en 2023, l’indicateur est en recul de 16 points sur un an et atteint un niveau inférieur de 6 points à sa moyenne historique. Ce repli de la confiance des dirigeants s’expliquerait notamment par l’incertitude autour de l’horizon de résorption des difficultés d’approvisionnements. 43 % des chefs d’entreprises l’estiment supérieur à un an et 40 % d’entre eux déclarent manquer totalement de visibilité. Plus généralement, le contexte de guerre en Ukraine est un motif d’inquiétude. Parmi divers risques mondiaux, le risque de conflit géopolitique est cité par 70 % d’entre elles (juste derrière le risque financier, à 77 %).
6. Au cours des prochaines années, la transition écologique et énergétique (TEE) tirerait l’investissement des TPE-PME, avec des disparités par taille.
Pour 36 % des TPE-PME, leur TEE serait source d’opportunité, avec des divergences selon la taille : 46 % des PME (10 à 250 salariés) contre 34 % des TPE (moins de 10 salariés).
En 2021, les investissements « verts », ont été concentrés dans un nombre restreint de TPE-PME : ils ont représenté plus de 10 % de leurs investissements pour seulement 11 % d’entre elles. Au cours des cinq prochaines années, 47 % des entreprises interrogées prévoient d’accroître leurs investissements « verts » (61 % des PME contre 44 % des TPE).
Le principal besoin des TPE-PME pour initier ou poursuivre leur TEE concerne les alternatives technologiques (42 %). Elles sont également nombreuses à citer le besoin de financement (32 %) et d’accompagnement (26 %).
Retrouvez l’enquête complète ainsi que les analyses sectorielles et régionales sur : https://lelab.bpifrance.fr/enquetes/enquete-pme-juillet2022
Condition de réalisation de l’enquête
La 75e enquête semestrielle de conjoncture de Bpifrance Le Lab a été réalisée par interrogation de 40 000 entreprises de 1 à 249 salariés entre le 12 mai et le 13 juin 2022, par voie postale ou numérique. L’analyse s’appuie sur un échantillon de 5 093 réponses reçues avant le 13 juin. En plus des questions récurrentes, des questions sur les difficultés d’approvisionnement, les conséquences de la guerre en Ukraine et plus généralement les sources d’inquiétudes des dirigeants, ainsi que sur la transition écologique et énergétique, ont été posées à l’ensemble de l’échantillon. Les réponses à l’ensemble de ces questions supplémentaires ont été redressées par taille et secteur d’activité.
Solde d’opinion : différence entre la proportion de répondants ayant exprimé une opinion positive et la proportion de répondants ayant exprimé une opinion négative.
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